Rencontres avec Leïla Slimani, Prix Goncourt 2016, à San Francisco et dans la Baie

En 2016, Leïla Slimani recevait le Prix Goncourt pour son deuxième roman, Chanson Douce. Depuis, la journaliste et écrivaine franco-marocaine est très présente dans les media. Elle sera à San Francisco et dans la Baie les 8, 9 et 10 avril prochains.

 

Quand Chanson Douce est sorti en librairies, je ne voulais pas le lire. J'avais appris que Leïla Slimani s'était inspirée de cette histoire affreuse qui avait défrayé la chronique à New York, celle de l'assassinat sordide de 2 très jeunes enfants par leur ''nounou''. Je trouvais cela impensable de restituer un épisode aussi horrible et intolérable, et ce d'autant plus, qu'ayant rencontré des amis proches de la famille des 2 victimes, leur douleur me rendait cette perspective encore plus inacceptable.

 

 

Et puis, il y a eu le Goncourt et les interviews de l'écrivaine, et j'ai voulu comprendre ce qui avait bien pu l'inspirer et la mener à écrire un récit aussi complexe et douloureux. 

 

Photo Credit: Catherine Hélie, Éditions Gallimard

 

Le cadre est différent, les personnes et le contexte aussi. Chanson Douce se passe à Paris, le jeune couple a 2 enfants, et surtout, on ne sait rien de l'histoire intime entre la nourrice New Yorkaise et la famille qui l'employait, tandis que Leïla Slimani s'attache justement à analyser dans le moindre détail, ce qui lie Louise à ses employeurs, et ce qui les emmènera au point de rupture irréparable.

 

Donc le parallèle doit s'arrêter là, celui d'une famille avec de jeunes enfants, et des parents qui travaillent, et ont donc besoin de recourir aux services d'une nourrice.

 

L'ironie veut cependant que le roman ait été traduit et que Leïla Slimani vienne en parler elle-même ici aux États-Unis tandis que le procès de la ''nounou'' assassine vient de s'ouvrir à New York, faisant ressurgir toute l'horreur du drame.

 

Chanson Douce... J'ai lu ici et là des commentaires qui disaient que ce n'était pas plausible, pas crédible. Effectivement, la folie ne l'est pas, ce qui participe à notre incapacité à l'anticiper, à la voir venir. Pourtant, il y a, dans ce récit, de la réalité. Et la force du roman de Leïla Slimani - à mon humble avis - est de repartir en arrière, de repartir du début, au moment où tout va bien et d'avancer vers le drame que l'on sait (puisque c'est la première phrase du roman) et peut-être de comprendre un peu les étapes du drame, la montée en puissance jusqu'au point de non-retour.

 

Pas plausible ? Mais si, et même possible. De même qu'Emmanuel Carrère avec son roman L'Adversaire et Nicole Garcia avec son film du même nom, nous montraient comment le mensonge insensé de toute une vie était, possible, justement, Leïla Slimani avance petit à petit dans la vie de ce couple, dans la vie de cette nourrice et montre les fêlures, les erreurs, les oublis, les inattentions, les fatigues, les doutes, les petits mensonges, les non-dits, les peurs, les réserves... qui peuvent aboutir à l'impossible drame ou en tous les cas, nourrir la folie meurtrière.

 

Alors oui, Chanson douce est un récit d'invention quand L'Adversaire était une histoire vraie. C'est la nuance essentielle à garder en tête pour éviter les confusions.

 

Allez rencontrer Leïla Slimani, écouter son avis, ses interprétations, ses intentions et ses projets. Elle sera présente à l'occasion de 3 événements :

 

Le 8 avril 2018 à Berkeley : rencontre avec Leïla Slimani @ the Berkeley Repertory Theater en collaboration avec le service culturel de l'Ambassade de France aux États-Unis.

> Infos sur l'événement

 

Le 9 avril 2018 à San Francisco : rencontre avec Leïla Slimani @ The Bindery en collaboration avec le Consulat de France à San Francisco, son service cuturel et la FACS.

> Infos sur l'événement

 

Le 10 avril 2018 à Stanford University : rencontre avec Leïla Slimani pour la conférence : Sexuality in Morocco and the Maghreb: An Absolutely Central Question to Society

> Infos sur l'événement

 

 

Chanson douce est déjà sur les rayons de Booksmith sur Haight Street. Au delà de l'intérêt évident de cette rencontre, vous adorerez découvrir The Bindery. Ce lieu à part a connu plusieurs vies : ancien Red Vic Theater, pilier de Haight Street, puis Food Court stylé, le voici lieux de réflexion et de lecture grâce à Booksmith. L'ambiance est feutrée et cosy. La salle du fond, réservée aux événements et aux rencontres, a été meublée et agencée avec goût et délicatesse. On souhaite une très longue vie à The Bindery.

 

 

 

... Nathalie Gobbi pour LostinSF